La région Occitanie a posé cet été de curieux panneaux à l’entrée de nombreux villages et villes des Pyrénées-Orientales. L’inscription dominante, « Bourg Centre » interroge car le mot bourg, familier dans plusieurs régions de France n’est jamais employé ici. Pour le Petit Robert le bourg est un gros village où se tiennent ordinairement les marchés. Fernand Braudel nous en apprend davantage dans L’identité de la France. « Au sortir du village, le bourg (en prenant le mot dans son sens le plus large, de gros village à petite ville) est la première dénivellation sur le chemin de la vraie ville. Pour la société rurale, il représente souvent, à lui seul, le monde extérieur en son entier : l’administration, la justice, le commerce… Il n’y a de bourg, en effet, que si, autour de lui, des villages ou hameaux utilisent ses marchés, ses foires, ses services, ses rendez-vous… Le bourg est essentiellement domination : il règne sur un canton rural qui a besoin de ses services, mais dont il vit, sans lequel il n’existerait pas lui-même. Dans un cercle de 5 à 10 kilomètres de rayon, guère davantage, une guirlande de villages sont ainsi sous sa dépendance… Tel est à des milliers d’exemplaires, le modèle des liens de subordination entre bourg et villages. »
La dénomination « Bourg Centre » nous interroge également en raison de sa redondance, le bourg étant un centre. Sur les moteurs de recherche on ne trouve d’ailleurs pas d’autre utilisation que celle proposée par la région Occitanie qui présente ainsi sa démarche : « Pour booster le développement des territoires ruraux, la région veut s’appuyer sur les bourgs-centres, ces communes de taille variable ayant en commun d’être le centre névralgique de tout un territoire. »
Les dictionnaires, l’oeuvre du grand historien et la région inscrivent le bourg dans un rôle de centralité sur un territoire rural. Mais là surgit une nouvelle interrogation. Pourquoi avoir posé ces panneaux à Canohès, au Soler, à Saint-Estève et aux entrées d’autres communes péri-urbaines ?
Et voilà que Reynès accède au statut de « Bourg centre ». « Bourg Centre » que l’on situerait plutôt à six kilomètres de là à Céret dont le marché du samedi attire les habitants des villages alentour.
Quel cumul d’incohérences et d’étrangetés !
On suppose qu’il n’a pas échappé aux conseillers régionaux d’Occitanie élus dans les P-O que le mot bourg ne fait pas partie de notre lexique local et que nombre de panneaux ont une implantation inappropriée. On veut alors croire qu’ils vont réagir.
Fabrice THOMAS